La dyslexie : comprendre et vivre avec
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Pour parler de dyslexie, qui de mieux qu’une personne elle-même atteinte de ce trouble ? Je ne prétends pas tout connaitre sur le sujet (au contraire), d’ailleurs je ne cesse de me documenter, mais voici ce que j’en sais et comment j’ai appris à vivre avec.
Qu’est-ce que la dyslexie ?
La dyslexie est un trouble de l’apprentissage qui affecte spécifiquement et significativement la capacité d’un individu à acquérir le langage écrit de manière appropriée. Reconnu par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) depuis 1993, ce trouble touche environ 10 % de la population (oui, une personne sur 10), avec des degrés de sévérité variables. Malgré les avancées scientifiques, la dyslexie reste souvent mal comprise, tant par les enseignants que par les parents.
Mais concrètement ?
La dyslexie est un trouble neurodéveloppemental qui se manifeste par des difficultés persistantes dans l’identification rapide et précise de mots écrits familiers, dans le décodage de séquences non familières de lettres, et dans la production de l’orthographe correcte des mots. En d’autres termes, elle impacte la capacité à identifier les mots écrits de manière fluide et précise. Elle se caractérise par des difficultés à reconnaître les mots écrits, à les épeler correctement et à les décoder. Il peut y avoir une confusion du sens des lettres.
Les causes de la dyslexie
Les causes de ce trouble sont principalement génétiques et neurologiques.
Des études montrent qu’elle tend à se transmettre au sein des familles, suggérant une forte composante héréditaire. Sur le plan neurologique, la dyslexie est liée à des différences dans la structure et le fonctionnement de certaines zones du cerveau, notamment celles impliquées dans le langage et la lecture.
Certains professionnels avancent aussi que des troubles psychoaffectifs peuvent être associés à la dyslexie. D’autres font des corrélations avec des problèmes attentionnels et visuoconstructifs.
Manifestations et symptômes
Les symptômes de la dyslexie varient selon l’âge et la sévérité du trouble.
Chez les jeunes enfants, on peut observer des difficultés à apprendre les lettres de l’alphabet, à reconnaître les sons de ces dernières et à associer les lettres et les sons.
À l’âge scolaire, les enfants et adolescents dyslexiques peuvent avoir du mal à lire des mots simples, à écrire correctement et à comprendre des textes.
Ils peuvent également éprouver des difficultés à suivre des instructions écrites et à organiser leurs idées par écrit ou à faire ressortir l’idée globale d’un texte sans se noyer dans les détails (mon cauchemar quand j’étais gamine).
Ceci peut aussi impacter leur raisonnement logique (je me souviens encore de ce jeu que me proposait mon orthophoniste et que je détestais : « Logix », pour apprendre à ordonner mes idées, quel enfer !).
Diagnostic et évaluation
Le diagnostic de la dyslexie repose sur une évaluation approfondie réalisée par des professionnels spécialisés, tels que des orthophonistes, des neuropsychologues ou des psychologues scolaires. Cette évaluation inclut des tests standardisés de lecture, d’orthographe, de compréhension de textes et de traitement phonologique.
Il est essentiel d’identifier la dyslexie le plus tôt possible pour mettre en place des stratégies d’intervention efficaces. Toutefois, il n’est jamais trop tard pour se prendre en charge. Une amie à moi a eu son diagnostic à l’âge de seize ans. Ce n’est qu’à cette période qu’elle a commencé les séances d’orthophonie qui lui ont été d’une grande aide pour sa scolarité et pour sa vie de jeune femme en devenir.
Stratégies d’accompagnement
Il n’existe pas de remède à la dyslexie, mais de nombreuses stratégies peuvent aider les individus concernés par ce trouble à surmonter leurs difficultés et à réussir dans leur parcours scolaire et professionnel.
1- Interventions pédagogiques : Des méthodes d’enseignement spécialisées, comme la méthode multisensorielle, qui utilise la vue, l’ouïe et le toucher pour enseigner la lecture et l’écriture, peuvent être très efficaces.
> Je ne la connais pas dans le détail mais, en tant que psychomotricienne de formation initiale, je le dis souvent sur mes réseaux sociaux : il faut diversifier les supports sensoriels, ne serait-ce qu’alterner entre la vision et l’ouïe pour commencer, ou bien combiner les deux. Utiliser plusieurs sens active diverses régions du cerveau, ce qui favorise un développement cognitif intégral et renforce les connexions neuronales.
2- Technologies d’assistance : Les outils numériques, comme les logiciels de lecture à voix haute, les correcteurs orthographiques et les claviers prédictifs, peuvent compenser certaines difficultés liées à la dyslexie.
> Pour ma part, je suis une grande adepte des logiciels de lecture à voix haute. Il n’y a pas un texte que j’écrive sans que je fasse appel à ce genre d’outil (oui, même pour cet article). D’une part, cela m’aide à soulager mon attention, mais aussi à détecter les coquilles qui seraient passées entre mes filets (souvent, oubli ou ajout d’un mot).
3- Adaptations scolaires : Les aménagements tels que le temps supplémentaire pour les examens, la possibilité d’utiliser des ordinateurs pour les devoirs et les tests, et l’accès à des textes en format audio peuvent grandement aider les élèves dyslexiques.
> Au lycée, j’ai eu droit à ce qu’on appelle un tiers temps pour mes examens. Franchement, sans ce temps en plus, jamais je n’aurais décroché le bac (Ô grand jamais !). Ça fait peut-être jaser certains, mais ils n’ont probablement pas conscience que demander à une personne très dyslexique de finir un examen sans temps supplémentaire, c’est comme demander à quelqu’un de courir un marathon avec des chaussures en plomb. Les deux peuvent franchir la ligne d’arrivée, mais l’un a besoin de plus de temps pour surmonter cet obstacle invisible qui le ralentit.
4- Support émotionnel : Les personnes dyslexiques peuvent éprouver de la frustration, une baisse de l’estime de soi et de l’anxiété. Le soutien psychologique et l’encouragement constant sont essentiels pour les aider à développer une attitude positive face à leurs défis
> Aujourd’hui, je suis heureuse de voir que nous vivons à une époque où ce trouble est de plus en plus reconnu et accompagné. Ce n’était pas le cas à mon époque. Alors, croyez-moi, quand on parle de perte d’estime de soi et de confiance en soi, je sais exactement de quoi il s’agit. Mais quoi qu’il en soit, il est essentiel de se rappeler que l’échec causé par ce type de handicap aura toujours un impact sur la confiance en soi. Il ne faut jamais dévaloriser les personnes dyslexiques, qui souvent sont d’une nature émotionnelle très sensible.
Qu’en est-il à l’âge adulte ?
Je ne peux que parler de mon expérience personnelle ici. Après avoir suivi des séances d’orthophonie de mes 6 à mes 20 ans, aujourd’hui je vis avec des séquelles (non, la dyslexie ne se guérit pas ! On apprend à vivre avec).
Si je devais donner trois conseils aux parents d’enfants dyslexiques ou aux adolescents confrontés à ce trouble, voici ce que je dirais :
1- La confiance en soi : Ne vous laissez jamais déstabiliser par les attitudes et remarques des autres. Travaillez sur vous pour cultiver cette confiance en soi
> J’entends déjà cette question : « Mais comment faire ? ». Je pense que chacun trouve sa propre méthode, mais voici ce qui a marché pour moi :
~ Trouvez un domaine où vous excellez : pour certains, c’est l’art, d’autres le sport ou les mathématiques (ce qui n’est pas du tout mon cas, je suis carrément NULLE en maths, mais j’ai des amis pour qui ça a marché).
~ Entourez-vous de personnes et de professionnels thérapeutes qui vous soutiennent et vous aident, vous ou votre enfant, à faire grandir cette graine de la confiance en soi
~ Entourez-vous de personnes compréhensives, surtout pour les enfants.
~ Échangez avec d’autres parents d’enfants dyslexiques pour partager vos méthodes d’accompagnement. Pour les adolescents et jeunes adultes, rencontrez d’autres personnes dyslexiques. Discutez autour de vous, vous réaliserez que beaucoup de gens sont dyslexiques et n’en parlent pas forcément. Rappelez-vous : près d’une personne sur dix est concernée par ce trouble, donc il y en a forcément autour de vous !
2- La thérapie : Cela va de soi, bénéficier d’un suivi en orthophonie est incontournable.
> Pour les enfants, ces séances se déroulent souvent sous forme de jeu (plus ou moins amusant, comme je l’ai mentionné plus tôt avec : « Logix »). Quant aux adolescents et jeunes adultes, le jeu reste au programme, mais l’orthophoniste les aide également à structurer leurs pensées et leurs idées de manière plus scolaire (mais toujours bien moins ennuyeuse qu’en classe, promis).
Pour les chanceux, vous tomberez peut-être sur un professionnel ouvert aux approches psychologiques qui vous aidera à cultiver votre confiance en soi.
D’autres thérapies peuvent également être bénéfiques, comme la programmation neurolinguistique (PNL). Grâce à cette méthode, j’ai appris à utiliser des « schémas heuristiques » qui ont vraiment transformé ma vie. Pour organiser ses pensées, selon moi, il n’y a pas mieux.
3- L’entrainement : C’est ici que cela se corse.
> S’entrainer à lire quand on n’aime pas lire, vraiment ? C’est pourtant l’un des conseils du professeur Habib, spécialiste des troubles d’apprentissage, lors d’une conférence sur les dys à laquelle j’ai assisté il y a quelques années. Voilà un défi de taille pour ceux qui n’y trouvent aucun plaisir.
Quand j’étais plus jeune, ce type d’argument me crispait sérieusement. À moins d’un coup de foudre littéraire, la lecture était une corvée, car elle vampirisait toute mon énergie attentionnelle. De plus, en tant que dyslexique, la mise en page du livre, la police utilisée et la plume de l’auteur pouvaient devenir un vrai frein à ma démarche de lecture. C’est pour cela que je conseille de commencer par des livres adaptés (des maisons d’édition comme les éditions ZTL, Castelmore, Dyscool de chez Nathan, Rageot, proposent des ouvrages plus faciles à lire pour les enfants).
Pour les adolescents et jeunes adultes, pourquoi ne pas débuter par des bandes dessinées, puis évoluer vers des livres légèrement moins illustrés jusqu’à s’en passer complètement ? Il existe des livres conçus pour rendre la lecture plus confortable. En tant qu’auteure spécialisée dans ce que j’appelle la « lecture confort », je propose des ouvrages avec une mise en page adaptée, pensée pour faciliter la lecture. Mes genres de prédilection sont ceux de l’imaginaire, comme la science-fiction, la fantasy et le fantastique. Pour en savoir plus sur ma philosophie de la lecture confort, je vous invite à consulter mon article dédié.
L’écriture est aussi un excellent moyen de s’améliorer. Pour ma part, j’ai commencé à écrire dès mon plus jeune âge, simplement par plaisir. Cela sollicite l’attention de manière différente et stimule la réflexion pour construire une histoire.
Aujourd’hui, après de nombreuses années, j’apprécie la lecture, bien que je sois encore difficile : une écriture trop complexe et hop, je referme le livre dès les premières pages. Les romans anciens ne sont pas vraiment ma tasse de thé. Je dirais que la lecture et l’écriture m’ont permis de renouer avec les lettres, qui sont maintenant mes grandes alliées. Alors si je devais donner un conseil, ce serait de choisir des petits livres, avec des illustrations si nécessaire, même pour les adultes, de pratiquer l’écriture (des journaux intimes pour les ados, par exemple, ou laissez libre cours à votre plume), de sélectionner des livres pour enfants adaptés ou des romans pour adultes conçus pour rendre la lecture plaisante, et de découvrir son genre littéraire préféré (il suffit de se baser sur les films qu’on aime le plus).
Conclusion
La dyslexie est un trouble complexe qui nécessite une compréhension et un soutien adaptés. Grâce aux avancées de la recherche et aux méthodes d’intervention modernes, les personnes dyslexiques peuvent non seulement surmonter leurs difficultés, mais aussi exceller dans de nombreux domaines. La clef réside dans la reconnaissance précoce du trouble, l’intervention ciblée et le soutien continu, permettant ainsi aux personnes dyslexiques de réaliser leur plein potentiel. Des ouvrages adaptés peuvent aider à se réconcilier avec la lecture. L’entrainement à la lecture et l’écriture est la clef de la réussite. Cultiver la confiance en soi reste incontournable.